Mais... où suis-je ?

Le Barde dans la Machine écrit pour vous des élucubrations sur les mondes imaginaires. Pour faciliter vos choix de lectures, les publications sont regroupées en thèmes :

"Récits", des nouvelles (entières ou par épisodes) qui parlent de SF et de Fantasy. Les récits les plus longs sont publiés par épisodes, puis compilés.
"Contes de la Marche", qui regroupe des récits de Fantasy se déroulant un même univers.
"Lubies", des textes plus courts sur des sujets aléatoires.
"Bouquins", où je vous narre et critique mes derniers lectures.
"Carnets", de brèves observations ou impressions, en quelques paragraphes.

Les Bons Mots

Quand on passe du temps à choisir ses mots (c’est mon cas), il est difficile de ne pas relever ceux qui sont mal employés. En général, ces remarques se cantonnent au domaine de la cuistrerie mesquine, mais dans certains cas les enjeux sont plus importants. Prenez, par exemple, les pandémies.

Depuis un an, on nous demande d’appliquer rigoureusement la « distanciation sociale » (les anglophones ne font pas mieux avec le « social distancing »). En entendant pour la première fois cette expression, on aurait pu croire qu’il fallait moins interagir avec ses amis, que ce soit pour les voir, leur parler, avoir des activités communes… Pourtant, la distance dont il est question n’est pas sociale, en réalité elle se définit par un critère uniquement physique : un espace d’au moins « x » mètre. Elle ne nous impose en rien de limiter les interactions sociales sans proximité physique, par exemple les coups de téléphone et autres appels vidéo – ceux-là mêmes qui ont fait de notre quotidien un rappel de la SF des années 70.

Une expression qui évoque isolement et solitude était-elle la meilleure pour inciter le plus grand nombre à adopter ce comportement ? Ne pouvait-on plutôt parler de distanciation physique ?

De même le mot « confinement », qui semblait approprié au début, tourne de plus en plus au malentendu. Nous demande-t-on encore, vraiment, de nous confiner chez nous ? Il suffit de visiter un parc pour comprendre que non. L’étude du virus nous a appris qu’il se propage surtout en milieu fermé, mal aéré et, comment dire, « confiné » ; l’action sanitaire se focalise désormais sur les lieux de rassemblement en intérieur. Au contraire les extérieurs présentent moins de risques, surtout en l’absence de foule. En employant un terme adapté, on communiquerait une idée plus exacte, et cela éviterait de rappeler à certains la claustrophobie du printemps 2020.

Je regrette aussi qu’on n’ait pas trouvé – ou créé – de mot plus fort pour désigner la protection des autres, une notion qui se trouve au centre de la lutte contre la pandémie. Car l’enjeu des gestes barrières n’est pas juste de sauver sa propre peau ; c’est aussi, surtout, de ne pas servir de tremplin au virus, de ne pas prolonger sa course jusqu’à d’autres personnes à qui il fera du mal, de ne pas contribuer à l’engorgement des salles de réanimation. Un virus n’existe qu’en se propageant, et quand on ne lui fait pas obstacle par les quelques moyens simples qui nous sont demandés, on devient une ressource consentante de l’épidémie. Nous avons tous entendu quelqu’un négliger ces gestes parce qu’il « n’avait pas peur », sans une pensée pour ceux qui pourraient souffrir par sa faute.

Malgré toute mon envie, je n’ai pas toujours imaginé de solution satisfaisante à ces termes manquants. Trouver les bons mots est un vrai labeur, qui peut produire des effets profonds.

Le Cerveau

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Équinoxe

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