Mais... où suis-je ?

Le Barde dans la Machine écrit pour vous des élucubrations sur les mondes imaginaires. Pour faciliter vos choix de lectures, les publications sont regroupées en thèmes :

"Récits", des nouvelles (entières ou par épisodes) qui parlent de SF et de Fantasy. Les récits les plus longs sont publiés par épisodes, puis compilés.
"Contes de la Marche", qui regroupe des récits de Fantasy se déroulant un même univers.
"Lubies", des textes plus courts sur des sujets aléatoires.
"Bouquins", où je vous narre et critique mes derniers lectures.
"Carnets", de brèves observations ou impressions, en quelques paragraphes.

Revenir

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Aujourd’hui, pas de duels à l’arme blanche ni de spéculation sur l’intelligence artificielle. Je voudrais vous conter une autre sorte d’histoire, une découverte née du hasard et d’une envie d’élégance. Une rencontre qui signifiait voyager, partir et revenir, et bien d’autres choses.

Lors d'une discussion autour de bières, lister les choses à faire quand on aura une année devant soi. Noter, comme une boutade, « Danseur de tango à Montevideo », et rire parce que ça rime.

Débarquant au Rio de la Plata, aborder le sujet avec curiosité. Plaza Dorrego, le nez au vent, observer une Milonga en plein air. Magie des pas synchronisés : un ténébreux aux cheveux longs qui fait sa démo, de vieux couples qui dessinent sur le sol à petits pas. Ressentir pour la première fois l’envie d'en faire autant.

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Prendre des cours, se faire des amis débutants avec qui s'encourager et parcourir un bout de chemin. Apprendre et réapprendre les bases avec des professeurs différents.

De retour en France, nouveaux amis, mêmes efforts, et premières sorties timides où l’on mesure ce qui reste à apprendre, la longueur de la route que l’on a prise. S’acharner en rêvant à une récompense lointaine, hypothétique.

Aller d'un professeur à l'autre, élargir ses horizons ; découvrir des lieux inhabituels dans une ville familière. Rencontrer des gens à qui on ne ressemble pas.

Faire son apprentissage, assembler l’une après l’autre les pièces du puzzle, maladroitement. La posture, la musique, l’étreinte, le bal, le guidage... parfois, aussi, s’amuser. Commencer à y comprendre quelque chose, toucher la réalité derrière les mots qui semblaient abstraits.

Explorer les auteurs, faire connaissance avec Pugliese. Écouter cent fois A Evaristo Carriego, et se réjouir de tout ce qui reste à découvrir. Établir ses préférences, en musique comme en danse ; regarder hors du cadre de son premier enseignement, trouver de nouvelles influences.

Au restaurant, lever la tête avec un sourire niais et annoncer à ses copains, qui n’en ont cure : « Vous entendez ? Ils passent du tango ! »

Pratiquer sans relâche, ne pas se décourager. Et enfin, un soir, sur le chemin du retour, se dire « Là, j’ai vraiment dansé ».

Dans la rue, marcher le buste droit, dérouler le pied ; fredonner. Le tango est une marche.


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Tener un corazón ligero! Vale decir, amar a todas las mujeres bellas.
Y una moral ligera, vale decir, andar con gitanos alegres
y dormir en un puerto un ocaso cualquiera y en otro puerto y otro
y andar con suavidad y con desenvoltura de fumador de opio.

Para que a cada paso un paisaje o una emoción o una contrariedad
nos reconcilien con la vida pequeña y su muerte pequeña.

— Cuarteto Cedrón, La Cerveza del Pescador Schiltigheim


Partager les mauvaises expériences et les bonnes rencontres. Aller prendre un cours pour se changer les idées, pour retrouver des amis. Recevoir les encouragements de profs bienveillantes.

Prendre de l’assurance, et parfois sentir le frémissement d’une expression corporelle, d'une danse improvisée. Poser ses pas sur des notes de musique.

Lutter contre le découragement, quand tout ce que l’on croyait acquis part en morceaux. Et soudain, un soir, pendant une tanda, avec une danseuse, connaître la légèreté absolue, planer en liberté.

Voilà la récompense : elle en valait la peine.

Plus tard, retrouver la danseuse, mais le moment est passé, elle n’en a rien senti.

Rechercher les milongas comme des friandises, oubliée l’appréhension de naguère. Danser n’importe où, dans la rue, en vacances. Avec des danseuses dont on ne parle pas la langue, partager un langage du corps. Sous les lumières de la Tour Eiffel ou dans la cour d'un monastère italien, graver dans sa mémoire des images fugaces, des instants suspendus.

Après des heures à danser, entre épuisement et transe, trouver des pas que l’on ne connaissait pas, et les oublier aussitôt. Aux premiers accords de la Cumparsita, chercher frénétiquement quelqu’un avec qui terminer en beauté avant que la musique ne s’arrête.

Un beau jour, s’éloigner, à cause d’une avarie mécanique ou d’un changement de vie. Penser au jour où l’on reviendra.


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Volver
Con la frente marchita
Las nieves del tiempo platearon mi sien

— Carlos Gardel & Alfredo Le Pera, « Volver »


Revenir au tango. Se découvrir rouillé, mais n’avoir rien oublié.

Revenir au tango... Peut-on jamais le quitter ?

La Croisée des Chemins (récit complet)

Servitude

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